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si vous la trouvez bonne, faites-la cacheter et la lui donnez ; si elle ne vous plaît pas, brûlez-la : elle ne vous oblige à rien. Vous voyez mieux que moi si elle est à propos, ou non ; d’ici je ne la crois pas mal, mais ce n’est point d’ici qu’il en faut juger. Vous savez que je n’ai qu’un trait de plume ; ainsi mes lettres sont fort négligées ; mais c’est mon style, et peut-être qu’il fera autant d’effet qu’un autre plus ajusté. Si j’étois à portée de recevoir votre avis, vous savez combien je l’estime, et combien de fois il m’a réformée ; mais nous sommes aux deux bouts de la France : ainsi il n’y a rien à faire, qu’à juger si cela est à propos ou non, et sur cela, la donner ou la brûler. Ce n’est pas sans chagrin qu’on sollicite une si petite chose, mais il faut se vaincre dans les sentiments qu’on auroit fort naturellement là-dessus. J’ai de plus à vous dire que j’ai vu faire ici des pas pour moins, et que tout ce qui vient tous les ans est excellent, et qu’enfin chacun a ses raisons.

M. et Mme de Chaulnes m’écrivent de six lieues d’ici, avec des tendresses et des reconnoissances de l’honneur que je leur avois fait par ma présence (c’est ainsi qu’ils disent), qu’ils n’oublieront jamais.

Pour vos dates, ma bonne, je suis de votre avis : c’est une légèreté que de changer tous les jours. Quand on se trouve bien du 26e ou du 16e, par exemple, pourquoi changer ? C’est même une chose désobligeante pour ceux qui vous l’ont dit. Un homme d’honneur, un honnête homme vous dit une chose bonnement et comme elle est, et vous ne le croyez qu’un jour ; le lendemain, qu’un autre vous dise autrement, vous le croyez ; vous êtes toujours

    presque en même temps ; mais l’exil de ce dernier ne finit qu’en 1683. Voyez la note 3 de la lettre 143, et sur le comte de Guiche la note 8 de la lettre du 14 octobre 1671.