Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 2.djvu/369

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 363 —

prendrois une chopine ; il feroit un bel effet avec cette belle disposition que vous voyez.


1671

204. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, dimanche 20e septembre.

Mon Dieu, ma bonne, que je suis aise, que je suis contente, et que la crainte et la joie que j’eus vendredi fut extrême ! Enfin, ma très-chère bonne, je trouvai deux de vos lettres, dont le dessus étoit écrit de votre propre main. On ne peut expliquer ce que l’on sent dans ces moments, et même, afin que ma joie fût complète, j’eus les deux paquets, dont on m’ôte quelquefois le premier. Cependant j’ai perdu des lettres d’affaires et des détails dont j’aurois une extrême curiosité. Il est difficile de nous en consoler que l’année qui vient. Notre cher oncle souhaite ce voyage, et vous rendra tous les services que vous pouvez attendre de son habileté et de son affection.

Ce n’est pas sans raison, ma chère fille, que vous fûtes troublée du mal du pauvre chevalier de Buous[1] : il est étrange. C’est un garçon qui me plaisoit dès Paris ; je n’ai pas de peine à croire tout ce que vous m’en dites. Ce qui est plus extraordinaire, c’est cette crainte de la mort. C’est un beau sujet à faire des réflexions, que l’état où vous me le dépeignez. Il est certain qu’en ce temps-là nous aurons de la foi de reste : elle fera tous nos désespoirs et tous nos troubles ; et ce temps que nous prodiguons, et que nous voulons qui coule présentement, nous man-

  1. Lettre 204. — 1. Voyez la note 11, et plus haut la lettre 181, p. 267. Dans les éditions de 1726, il y a Beon au lieu de Buous.