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ont été perdus, ces chères, ces aimables lettres dont je suis entourée, que je relis mille fois, que je regarde, que j’approuve. N’est-ce pas un grand déplaisir pour moi de savoir que vous m’en écriviez deux toutes les semaines, et de n’en avoir reçu qu’une plus de quatre semaines de suite ? Si c’étoit pour vous soulager, je l’approuverois, et même je vous le conseillerois ; mais vous les avez écrites, et je ne les ai pas. Si vous aviez le mémoire de vos dates, vous verriez bien celles qui vous manquent ; vous l’aviez pour ce fripon de Grignan ; faut-il que je l’embrasse après cette préférence ? Parlez-moi de Mme de Rochebonne[1], et faites des amitiés à mon cher Coadjuteur et au bel air du Chevalier : je lui défends de monter à cheval devant vous[2]. On me mande que mes petites entrailles[3] se portent bien. Elles vont être habillées ; cela est joli, de petites entrailles avec une robe.

Si Mme de Simiane vouloit savoir des nouvelles de son premier sénéchal[4], vous lui pourriez dire qu’il planta là cette maîtresse qu’il avoit ; qu’après elle, il épousa la femme d’un homme qui enfin la lui laissa sans façon ; et que présentement il l’a laissée pour une autre toute mariée aussi, qu’il a enlevée de vive force. C’est l’une des plus belles choses du monde ; mais ce qu’il y a de plus merveilleux, c’est qu’il a un cadet qui en a fait autant en basse Bretagne : on lui a envoyé des gardes pour l’amener ici. Il y a des gens dont l’étoile fait rire.

  1. 9. Voyez la note 5 de la lettre 185.
  2. 10. Voyez la note 8 de la lettre 159. — La fausse couche de Livry (4 novembre 1669) avait été causée par la peur qu’éprouva Mme de Grignan en voyant le Chevalier son beau-frère monter un cheval fougueux. Voyez la Notice, p. 110, et la lettre du 6 septembre 1671.
  3. 11. C’est ainsi que Mme de Sévigné nommoit sa petite-fille (Marie-Blanche), qu’elle avoit laissée à Paris en nourrice. (Note de Perrin.)
  4. 12. Sans doute « ce sénéchal de Bennes, qui était si fou, qui a eu tant d’aventures. » Voyez la lettre du 24 juillet 1689.