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et des villes, quinze ou vingt grandes tables, un jeu continuel, des bals éternels, des comédies trois fois la semaine, une grande braverie[1] : voilà les états. J’oublie quatre cents pièces de vin qu’on y boit : mais, si j’oubliois ce petit article, les autres ne l’oublieroient pas, et c’est le premier. Voilà ce qui s’appelle, ma bonne, des contes à dormir debout ; mais ils viennent au bout de la plume, quand on est en Bretagne et qu’on n’a pas autre chose à dire. J’ai mille baisemains à vous faire de M. et de Mme de Chaulnes. Je suis toujours toute à vous, et j’attends le vendredi où je reçois vos lettres avec une impatience digne de l’extrême amitié que j’ai pour vous. Notre abbé vous embrasse, et moi mon cher Grignan, et ce que vous voudrez.


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192. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, dimanche 9e août[2].

Vous n’êtes point sincère quand vous me louez tant aux dépens de vous-même et vous méprisant comme vous faites. Il me siéroit mal de faire votre panégyrique à vous-même, et vous ne voulez jamais que je dise du mal de moi. Je ne veux donc faire ni l’un ni l’autre ; mais enfin, ma bonne, si vous avez à vous plaindre de moi, ce n’est point de n’avoir point en vous de bonnes qualités et le fonds de toutes les vertus. Vous pouvez remercier Dieu de tout ce qu’il vous a donné ; car pour moi, je n’ai point

  1. 11. Magnificence, surtout dans les habits. Voyez la note 3 de la lettre 78. — Dans l’édition de Rouen (1726), braverie est remplacé par magnificence d’habits, tant des hommes que des femmes.
  2. Lettre 192. — 1. Dans les éditions de 1726 et dans celle de 1734, cette lettre est datée du (vendredi) 7e août.