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ce sujet. Il faut pourtant que je vous fasse encore mille baisemains de sa part, et que je vous dise qu’on ne peut estimer plus une personne qu’elle vous estime : elle est instruite par d’Hacqueville de ce que vous valez. Quelle fortune que celle de cette femme ! Elle avoit cent mille écus : fille d’un conseiller[1], ma bonne ! Tout est rangé selon l’ordre de la Providence. Cette pensée doit fixer toutes nos inquiétudes, et vous, ma très-belle, comment êtes-vous ? où en êtes-vous de vos Grignans ? Le pauvre Coadjuteur a-t-il encore la goutte ? L’innocence est-elle toujours persécutée ?

Je fis hier matin un acte généreux : j’avois huit ou dix ouvriers qui fanoient mes foins. pour nettoyer des allées[2], et j’avois envoyé mes gens à leur place. Picard n’y voulut pas aller, et me dit qu’il n’étoit pas venu pour cela en Bretagne, qu’il n’étoit point un ouvrier, et qu’il aimoit mieux s’en aller à Paris. Sans autre forme de procès, je le fis partir à l’instant. Je pense qu’il couchera aujourd’hui à Sablé. Pour sa récompense, il l’a si peu méritée par quatre années de mauvais service que je n’en ai rien sur ma conscience : elle me viendra comme elle pourra.

Il faut avouer que la disette de sujets m’a jetée aujourd’hui dans de beaux détails. En voici encore un. Cette Mme Quintin[3], que nous vous disions qui vous ressembloit, à Paris, pour vous faire enrager, est comme

  1. 5. Voyez la note 14 de la lettre 174.
  2. 6. Tel est le texte du manuscrit. Le copiste a évidemment sauté quelques mots, dont le sens était sans aucun doute : « je les en avois retirés, je leur avois fait interrompre ce travail… » ou, tout simplement, comme dans la lettre suivante, « je les avois pris (pour nettoyer des allées). » — Les mots qui terminent l’alinéa : elle me viendra comme elle pourra, sont obscurs ; nous nous sommes conformés exactement au manuscrit.
  3. 7. Suzanne de Montgommery, femme de Henri Goyon de la Moussaie, comte de Quintin.