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se communiquent pas de vous à moi, et de moi à vous. Je vous recommande la santé de ma fille ; soyez-y appliqué, soyez-en le maître ; ne faites point comme au pont d’Avignon ; sur cela seul gardez votre autorité ; pour tout le reste, laissez-la faire, elle est plus habile que vous : elle m’écrit des choses admirables de ses bonnes intentions sur vos affaires. Ah ! que je vous plains de ne plus recevoir de ses lettres ! vous étiez bien plus heureux il y a un an : plût à Dieu que vous eussiez cette joie, et que j’eusse le chagrin de la voir et de l’embrasser ! Ne trouvez-vous pas que nous sommes assez bien ensemble ? Croyez-vous qu’elle m’aime toujours ? Adieu, mon très-cher Comte. Quoique vous soyez l’homme du monde le plus aimé, je ne crois pas que vous ayez jamais eu aucune belle-mère[1] qui vous ait autant aimé que moi.


1671

182. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, mercredi 8e juillet.

J’ai bien envie de savoir comment vous vous portez de votre saignée : il me semble que par respect on n’a pas

    les parties les plus subtiles du sang, volatilisées par la chaleur du cœur, résidaient dans le cerveau, d’où, obéissant aux impressions de l’âme et des sens, elles se transportaient avec la rapidité de l’éclair dans toutes les parties du corps humain. Il faisait de ces esprits animaux (« qui sont, disait-il, comme un vent très-subtil, ou plutôt comme une flamme très-pure et très-vive, montant continuellement en grande abondance du cœur dans le cerveau, allant se rendre de là par les nerfs dans les muscles et donnant le mouvement à tous les muscles ») un milieu entre l’esprit et la matière ; et il attribuait l’amour et l’amitié à une commotion de ces esprits, par laquelle notre volonté est déterminée à nous unir aux objets de nos affections.

  1. 11. Mme de Sévigné était la troisième.