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ne sera pas médiocre de l’esprit dont je suis. Vous voudriez quitter votre splendeur pour être une simple bergère auprès de moi dans mes grandes allées. Hélas ! je le crois, pour quelques heures seulement. Vous pouvez penser combien de souvenirs de vous entre la Mousse et moi, et combien de millions de choses nous en feront souvenir, sans compter cette pensée habituelle qui ne me quitte jamais. Il est vrai que je n’aurai point Hébert ; j’en suis fâchée, mais il faut se résoudre à tout : il est revenu de Chantilly, il est désespéré de la mort de Vatel, il y perd beaucoup ; Gourville l’a mis à l’hôtel de Condé pour faire cette petite charge dont je vous ai parlé. M. de la Rochefoucauld dit qu’il prend des liaisons avec Hébert, dans la pensée que c’est un homme qui commence une grande fortune : à cela je lui réponds que mes laquais ne sont pas si heureux que les siens[1]. Ce duc vous aime, et m’a assurée qu’il ne vous renverroit point votre lettre toute cachetée. Mme de la Fayette me prie toujours de vous dire mille choses pour elle : je ne sais si je m’en acquitte bien. Ne m’écrivez, ma chère bonne, qu’autant que cela ne fera point de mal à votre santé, et que cela soit toujours de l’état où vous êtes. Répondez moins à mes lettres et me parlez de vous : plus je serai en Bretagne, plus j’aurai besoin de cette consolation ; ne m’expédiez point là-dessus, et si vous ne le pouvez, faites écrire la petite Deville, et empêchez-la de donner dans la justice de croire, et dans les respectueux attachements. Qu’elle me parle de vous, et quoi encore ? de vous et toujours de vous.

Vous êtes plaisante avec vos remerciements. Enfin vous êtes au point de faire des présents des gazettes de

  1. 9. Gourville avait été valet de chambre de la Rochefoucauld. Voyez la note 3 de la lettre 158.