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avons vu une fois à Livry. Elle trouve que votre frère a la simplicité de la colombe ; il ressemble à sa mère. C’est Mme de Grignan qui a tout le sel de la maison, et qui m’est pas si sotte que d’être dans cette docilité. Quelqu’un pensa prendre votre parti, et voulut lui ôter l’estime qu’elle a pour vous : elle le fit taire, et dit qu’elle en savait plus que lui. Quelle corruption ! Quoi ! parce qu’elle vous trouve belle et spirituelle, elle veut joindre à cela cette autre bonne qualité, sans laquelle, selon ses maximes, on ne peut être parfaite ? Je suis vivement touchée du mal qu’elle fait à mon fils sur ce chapitre : ne lui en mandez rien ; nous faisons nos efforts, Mme de la Fayette et moi, pour le dépêtrer d’un engagement si dangereux. Il y a de plus une petite comédienne[1], et les Despréaux et les Racine avec elle ; ce sont des soupers délicieux, c’est-à-dire des diableries[2]. Il s’étourdit sur les sermons du P. Mascaron ; il lui faudroit votre minime[3]. Je n’ai jamais rien vu de si plaisant que ce que vous m’écrivez là-dessus : je l’ai lu à M. de la Rochefoucauld ; il en a ri de tout son cœur. Il vous mande qu’il y a un certain apôtre qui court après sa côte, et qui voudroit bien se l’approprier comme son bien ; mais il n’a pas l’art de suivre les grandes entreprises. Je pense que Merlusine est dans un trou ; nous n’en entendons pas dire un seul mot. Il vous dit encore que s’il avoit seulement trente ans de moins que ce qu’il a, il en voudroit fort à la troisième côte[4] de M. de Grignan. L’endroit où vous dites qu’il a deux côtes rompues le fit éclater. Nous vous

  1. 10. La Champmeslé. Voyez la note 21 de la lettre 146.
  2. 11. Voyez la Notice, p. 119.
  3. 12. Le minime qui prêchait à Grignan. (Note de Perrin.)
  4. 13. C’est-à-dire, à Mme de Grignan, qui était la troisième femme de M. de Grignan. Mme de Sévigné fait une nouvelle allusion à l’expression de la côte rompue dans la lettre du 20 octobre 1679.