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intelligents tout de même, et ils paraissent braves gens. »

Quand les enfants s’éveillèrent, leur déjeuner était prêt : ils y firent honneur et furent enchantés des améliorations de leur mobilier.

Quelques semaines se passèrent ainsi ; Jacques et Paul commençaient à apprendre le russe et même à dire quelques mots : les enfants des domestiques les suivaient partout et les regardaient avec curiosité. Un jour Jacques et Paul parurent en habit russe : ce furent des cris de joie ; ils s’appelaient tous pour les regarder : Mìshka, Vàska, Pétroùska, Annoushka, Stépàne, Màshinèka, Sònushka, Càtineka, Anìcia[1] ; tous accoururent et entourèrent Jacques et Paul, en donnant des signes de satisfaction. À la grande surprise de Paul, ils vinrent l’un après l’autre leur baiser la main. Les petits Français, protégés et grandis par la faveur du général, leur semblaient des êtres supérieurs, et ils éprouvaient de la reconnaissance de l’abandon de l’habit français pour le caftane national russe.

Paul

Pourquoi donc nous baisent-ils les mains ?

Jacques

Pour nous remercier d’être habillés comme eux et d’avoir l’air de nous faire Russes.

  1. Diminutifs de Michel, Basile, Pierre, André, Étienne, Marie, Sophie, Catherine, Agnès. Les accents indiquent la syllabe sur laquelle il faut appuyer fortement.