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ni enfin aucune torture corporelle, sous peine d’annuler tout ce que le comte avait concédé à sa nièce.

Mme Papofski, qui était présente avec ses trois aînés pour assister aux exécutions, poussa un cri de rage, se jeta sur le staroste pour arracher et mettre en pièces ce papier maudit ; mais le staroste l’avait prestement passé à son voisin, qui l’avait donné à un autre, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le papier eût disparu et fût devenu introuvable.

« Maria Pétrovna, dit le staroste avec un sourire fin et rusé, l’acte signé de M. le comte est entre les mains du capitaine ispravnik ; il ne m’a envoyé qu’une copie. »

Le staroste sortit après s’être incliné jusqu’à terre ; les paysans en firent autant, et tous allèrent au cabaret boire à la santé de leur bon M. le comte, de leur excellent maître.

Mme Papofski resta seule avec ses enfants, qui, effrayés de la colère contenue de leur mère, auraient bien voulu s’échapper ; mais le moindre bruit pouvait attirer sur leurs têtes et sur leurs épaules l’orage qui n’avait pu encore éclater. Ils s’étaient éloignés jusqu’au bout de la salle, et s’étaient rapprochés de la porte pour pouvoir s’élancer dehors au premier signal.

Une dispute s’éleva entre eux à qui serait le mieux placé, la main sur la serrure ; le bruit de leurs chuchotements amena le danger qu’ils redoutaient. Mme Papofski se retourna, vit leurs visages terrifiés, devina le sujet de leur querelle