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trovna ! Personne n’a de droit sur nous que notre père l’empereur, le gouverneur et le capitaine ispravnik[1]. »

La colère de Mme Papofski redoublait ; elle ne voyait aucun moyen de se faire obéir. Nikita sortit ; Mashka s’esquiva ; Mme Papofski resta seule à ruminer son désappointement. Elle finit par se consoler à moitié en songeant à l’abrock de cent roubles par tête qu’elle ferait payer à ses six mille paysans de Gromiline et à tous les paysans de ses autres propriétés nouvelles.

On lui prépara son déjeuner comme à l’ordinaire ; quoique mécontente de tout et de tout le monde, elle n’osa pas le témoigner, de peur que les cuisiniers ne fissent comme les autres domestiques, et qu’elle ne trouvât plus personne pour la servir.

Les enfants portèrent le poids de sa colère ; elle tira les cheveux, les oreilles des plus petits, donna des soufflets et des coups d’ongles aux plus grands, les gronda tous, sans oublier les bonnes, qui eurent aussi leur part des arguments frappants de leur maîtresse. Ainsi se passa le premier jour de son entrée en possession de Gromiline et de ses dépendances.

Les jours suivants, elle se promena dans ses bois, dans ses prés, dans ses champs, en admira la beauté et l’étendue ; marqua, dans sa pensée, les arbres qu’elle voulait vendre et couper ; parcourut les villages ; parla aux paysans avec une

  1. Espèce de juge de paix, de commissaire de police, qui a des pouvoirs très étendus.