Page:Ségur - Le général Dourakine.djvu/171

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mourant de faim et de fatigue ? Lui, prince, riche à millions et que je croyais mort ! »

Le général courut plutôt qu’il ne marcha vers la porte, dit à Dérigny de le guider, et marcha de toute la vitesse de ses grosses jambes vers le bois où gisait Romane.

Dès qu’il l’aperçut, il alla à lui, le souleva, l’embrassa, le soutint dans ses bras, et le regarda avec une profonde pitié mélangée de surprise.

« Mon pauvre ami, quel changement ! quelle maigreur ! Qu’est-il arrivé ? »

Romane ne répondit pas et désigna du regard Dérigny, dont il ignorait la discrétion et la fidélité. Le général comprit et dit tout haut :

« Parlez sans crainte, mon pauvre garçon. Dérigny a toute ma confiance ; il est discret comme la tombe, il nous viendra en aide s’il le faut, car il est de bon conseil.

L’étranger

Eh bien, mon cher et respectable ami, j’arrive de Sibérie, où je travaillais comme forçat, et d’où je me suis échappé presque miraculeusement. »

Le général fut sur le point, dans sa surprise, de laisser retomber Romane et de tomber lui-même.

« Toi, en Sibérie ! Toi, forçat ! C’est impossible ! Viens te reposer chez moi ; tu retrouveras tes idées égarées par la fatigue et la faim.

Romane

Si l’on me voit entrer chez vous, la curiosité de