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de fil, il s’agit de rendre plus intense sa production c’est donc la filature du coton que visent la plupart des inventions : la spinning-jenny (en 1765), le water- frame, d’Arkwright, deux ans plus tard, puis la mule-jenny de Crompton. La France, dans le domaine du machinisme, est très en retard ; il faut faire venir d’Angleterre ouvriers et machines.

La jenny était un petit métier à bras, que pouvaient employer les fileurs ou fileuses isolés ; elle ne nuisait donc nullement à l’industrie rurale. Au contraire, les mule- jennies et les machines continues favorisaient la concentration. En France, comme en Angleterre, le fait apparaît incontestable ; déjà avant la Révolution, un certain nombre de manufactures concentrées ont été créées : celles de Lecler, à Brives, de Martin et Flesselles, à Amiens, les fabriques fondées par le duc d’Orléans à Orléans et à Montargis, la manufacture de Louviers. Dans les premières années de la Révolution, le mouvement s’accélère encore. Mais c’est surtout à l’époque de l’Empire que la filature du coton devient une grande industrie, grâce à l’esprit d’organisation et aux ressources en capitaux d’hommes comme Bauwens et Richard-Lenoir.

En France comme en Angleterre, le machinisme ne gagna que plus tard l’industrie lainière, malgré l’invention de Cartwright. En France, c’est à l’époque napoléonienne que la transformation s’opéra, principalement grâce au prodigieux industriel que fut Ternaux, « qui couvrit la France d’usines et l’Europe de comptoirs ».

D’ailleurs, ne considérât-on que l’industrie textile, l’évolution est loin d’être achevée, même en Angleterre, au début du XIXe siècle. Le tissage mécanique est lent à s’établir, même dans la fabrication cotonnière. Dans l’industrie de la toile, le machinisme n’apparaît que