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jolie qu’on pût voir, et elle avait à l’oreille la marque que sa marraine avait touchée. Sa belle-mère la conduisit ensuite dans les ruines d’un vieux château, à trois lieues de chez elle, et elle l’y abandonna : la petite chèvre blanche broutait pour se nourrir l’herbe qui poussait parmi les ruines.

Quand le capitaine revint de voyage, il fut bien chagrin de ne plus voir sa petite fille qui était le portrait de sa défunte femme ; il cessa de naviguer en se disant qu’il était assez riche maintenant puisqu’il n’avait plus qu’un enfant. Mais, comme il s’ennuyait à terre, il allait à la chasse pour se distraire ; sa femme voulut l’en détourner, craignant qu’un jour il n’allât du côté des vieilles ruines qui servaient de refuge à beaucoup d’oiseaux ; mais elle eut beau faire, il se mit à chasser.

Un jour, il alla aux ruines, et vit la petite chèvre blanche qui broutait dans les anciens jardins du château où l’herbe poussait comme dans un champ.

— Ah ! s’écria-t-il, la jolie petite chèvre !

Elle le reconnut, et elle vint à lui ; elle lui léchait les mains en le regardant et en disant « Bée, Bée, » d’une voix si douce que le capitaine en était tout ému. Il la caressait en disant :

— Ah ! comme elle est jolie ! elle a les yeux comme ma pauvre Euphrosine, et porte comme elle une petite marque à l’oreille.

Il voulait la faire sortir du château et l’emmener avec lui ; mais elle ne pouvait quitter les ruines. Il s’éloigna bien marri, et quand il