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contes de la haute-bretagne.

Le tailleur se mit à l’aise ; car il avait toujours dans sa poche une poignée d’argent ; un jour qu’il était dans une auberge, une femme lui dit que sûrement pour être devenu riche en si peu de temps, il fallait qu’il eût tué ou volé. Les gendarmes arrivèrent et l’arrêtèrent. Alors il cria :

— À moi, mon bourgeois !

À la troisième fois, le Monsieur parut et dit :

— Pourquoi arrêtez-vous cet homme ?

— C’est parce qu’il a volé.

— Non, dit-il, lâchez-le, c’est moi qui lui ai donné tout l’argent.

(Conté en 1881 par J.-M. Comault, du Gouray.)

VI

LE COUTURIER QUI ALLA COUDRE CHEZ LE DIABLE

Il était une fois à Landébia un bonhomme et une bonne femme dont le fils était couturier, et, pour gagner du pain à ses parents, il allait coudre partout où on le demandait. Il était nourri et payé dix sous par journée.

Un jour qu’il avait été coudre chez des gens de mauvaise vie, il rencontra le soir en s’en revenant un de ses camarades qui lui dit :

— Si j’étais à ta place, Jean, je n’irais jamais travailler à la maison d’où tu viens.

— Je vais partout, répondit le couturier ; j’irais chez le diable s’il me demandait et voulait me payer.

Le lendemain il alla coudre dans la même maison, et à l’endroit où il avait parlé la veille à son camarade, il rencontra un beau monsieur qui lui dit :

— Te voilà, Jean ; qu’est-ce que tu disais en passant par ici hier au soir ?

— Je disais, répondit le couturier, que si le diable voulait me donner de l’ouvrage, j’irais bien coudre chez lui.