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contes de la haute-bretagne.

Le diable, voyant que les épreuves était accomplies, banda les yeux au jeune homme et lui dit de choisir entre ses deux filles qui étaient habillées pareillement et avaient la figure voilée. Le garçon leur tâta les pieds, et il choisit celle à qui manquait un doigt.

Cependant la Noire dit à son mari :

— Il nous faut partir ; car mon père et ma mère vont vouloir te tuer parce que c’était ma sœur qu’ils voulaient te donner.

Ils se mirent en route, et la femme du diable alla à leur poursuite.

Quand la fille vit paraître de loin sa mère, elle dit :

— Que je sois changée en église, et toi en prêtre.

La femme du diable entra dans l’église, et dit :

— Vous n’auriez point vu passer par ici Mlle la Noire avec un jeune homme ?

Dominus vobiscum, répondit le prêtre.

La femme du diable retourna à son mari :

— Les as-tu vus ? demanda-t-il.

— Non, je n’ai rien vu qu’une église et un prêtre à l’autel.

— C’étaient eux, dit le diable ; retourne les chercher.

Cependant la Noire avait repris sa forme naturelle, son mari aussi, et tout en fuyant elle lui disait :

— Regarde bien : ne vois-tu rien ?

— Si, j’aperçois une grosse fumée.

— C’est le diable ou sa femme ; je vais me changer en cane et toi en canard, et nous allons barboter dans le ruisseau.

Quand la femme du diable arriva au ruisseau, elle dit :

— Vous n’avez pas vu par ici Mlle la Noire et son mari ?

— Quand ! quand ! quand ! répondirent les canards.

La femme retourna à son mari, et lui dit :

— je n’ai encore rien vu, qu’un canard et une cane.

— C’étaient eux, dit le diable ; retourne à leur poursuite.

La Noire et son mari avaient repris leur première forme ; elle dit à son mari tout en fuyant :