Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/31

Cette page n’a pas encore été corrigée

Pour consoler le vieux maître et, à la fois, pour témoigner en faveur de la vérité, je répondis :

— Ce Sathon ment quant aux personnes, mais aujourd'hui il dit vrai quant à la doctrine. Il te calomnie atrocement, mais il expose avec force contre son prétendu Gorgias, plus d'une pensée qu'aime le vrai Gorgias, plus d'une pensée que tu m'avais enseignée avant que Socrate l'enseignât à Sathon et à moi.

Alors Gorgias, tout souriant :

— Tu es généreux, mon Antisthène, et tu pardonnes les injures comme il convient à un disciple de Gorgias et de Socrate. Car cet Aristoclès que les autres nomment Platon et que tu appelles spirituellement Sathon t'a fait autant de tort, quoique d'une autre sorte, qu'à Gorgias. Pour me réfuter sans peine, pour me rendre ridicule, pour paraître seul admirable, ce vaniteux me prête des pensées et des paroles qui ne sont point miennes. Et il fait le même mensonge contre Polos. Quant à toi il te fait une autre sorte d'injure et il publie, comme s'il les avait inventées, des pensées et même des phrases copiées dans tes livres. Tout ce qu'il y a de bon et de vrai dans son nouveau dialogue, il l'a pillé selon sa coutume. Mais cette fois ce n'est pas Epicharme et Sophron qu'il a volés, c'est le seul Antisthène. Quelle doctrine y a-t-il dans son Gorgias, qui ne fût déjà dans ton dialogue intitulé Le Politique ?

Et Gorgias loua Le Politique avec une magnificence généreuse, comme il savait louer, en homme assez riche pour admirer sans envie les richesses des autres :