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éthique. À celles-là, on demande d’agir par amour. Mais de quel amour est-il question ?

Si j’aime Dieu pour ses attributs métaphysiques, pour sa puissance, son immensité, son éternité, n’y a-t-il pas dans cet amour une sorte de stupeur lâche ? Cet amour n’est-il pas encore crainte et obéissance ? Je ne trouve à ce tendre rampement devant la force nulle beauté et nul courage.

Il faut donc supposer que l’amour s’adresse aux attributs moraux de Dieu, à sa justice et à sa miséricorde. Il me semble d’une sagesse plus sûre d’aimer justice et miséricorde sans affirmer naïvement leur réalisation dans l’absolu. Il me semble plus beau d’aimer justice et bonté, même si elles ne se trouvent nulle part qu’en mon esprit et en mon cœur, même si le mystère objectif n’est qu’un gouffre d’indifférence ou d’iniquité.

Pour me constituer une sagesse vraiment noble et solide, je l’affranchirai donc de toute métaphysique, de toute théologie, de toute religion. Mais ne la soumettrai-je pas à quelque science positive ? L’être moral n’appartient-il pas au monde et n’est-il pas celui qui obéit volontairement aux lois universelles ?

La matière vivante est de la matière et elle obéit aux lois physico-chimiques. Pourtant la vie m’ap-