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LA COMPLAINTE RUTEBEUF.

Or devendrai sobres et sages
Après le fet,
Et me garderai de forfet ;
Mes que ce vaut quant c’est jà fet ?
Tart sui méus ;
A tart me sui aparcéus
Quant je sui jà ès las[1] échéus.
Cest premier an
Me gart cil Diex en mon droit san
Qui por nous ot paine et ahan
Et me gart l’âme :
Or a d’enfant géu ma fame ;
Mon cheval a brisié la jame[2]
A une lice ;
Or veut de l’argent ma norrice,
Qui m’en destraint et me pélice[3],
Por l’enfant pestre,
Ou il reviendra brère en l’estre.
Cil dame Diex[4] à qui le fist nestre,
Li doinst chevance[5]
Et li envoit sa soustenance,
Et me doinst encore aléjance
Qu’aidier li puisse,
Que la povretez ne me nuise[6]

  1. Mss. 7633, 7615. Var. En mes las.
  2. Ms. 7633. Var. Mes chevaux ot brisié la jambe.
  3. Ces deux expressions sont fort énergiques ; elles signifient : torturer, et : arracher la peau.
  4. Ms. 7633. Var. Cil sire Diex. — Ms. 198 N.-D. Var. Ice Seigneur.
  5. Ms. 7615. Var. Provende.
  6. Les Mss. 7633, 7615 et 198 N.-D. offrent cette variante :
    Et que miex mon hosteil conduise.