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ET DE LA FAMME AU CHEVALIER.

Li rudes hom fet la rude œuvre ;
Se rudes est, rude est bués,
Rudes est s’a non Rudebués[1] :
Rustebués œvre rudement,
Savez[2] en sa rudèce ment.
Or prions au définement
Jhésu-Crist, le roi bonement,
Qu’il nous doint joie pardurable
Et paradis l’espéritable.
Dites Amen trestuit ensanble :
Ci faut li diz, si com moi sanble.


Explicit du Secrestain et de la Famme au Chevalier.

  1. Cette pièce contient plusieurs passages qui sont singulièrement peu harmonieux : d’abord celui auquel je mets cette note, et qui n’offre que de détestables jeux de mots, lesquels n’ont de poésie que la rime ; et ensuite deux vers d’une remarquable cacophonie, et que le lecteur aura sans doute remarqués plus haut ; les voici :
    Anemis si les entama
    Que li amis l’amie ama,
    Et l’amie l’ami amot.
    Du reste, une chose remarquable dans cette pièce, c’est le rôle qu’y joue la sainte Vierge. Par suite du culte spécial qu’on avait eu pour la mère de Dieu au 12e siècle, et qui régnait encore quoique moins vif au 13e, tout ce qui pouvait faire éclater la puissance de Marie était admis sans exception et regardé comme un éloge. Nos bons aïeux mirent d’ailleurs quelquefois dans la bouche des saints et des saintes des discours quelque peu étranges. On lit dans le mystère intitulé Les miracles de sainte Geneviève, qui se trouve dans mes deux volumes de Mystères inédits, ces paroles adressées par la sainte à une nonne :
    · · · · · · · · · · · · · · · Vierge sainte
    Non vous estes, mais vierge fainte ;
    Non pas vierge, mais ribaude
    Qui fustes en avril sy baude,
    Le tiers jour, entre chien et lou,
    Qu’au jardin Gauthier Chantelou
    Vous souffristes que son berchier
    Vous defflourast sous un peschier.
  2. Ms. 7633. Var. Sovent.