Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/214

Cette page a été validée par deux contributeurs.

enrichies de belles sculptures, et même (quoique sous ce rapport, Venise tînt toujours le premier rang), brillantes de couleur et d’or.

Après s’être formé une conception réelle et vivante, soit d’un groupe de palais vénitiens au XIVe siècle, soit d’une rue encore plus riche et plus fantaisiste de Rouen, d’Amiens, de Cologne ou de Nuremberg, que le lecteur — gardant cette image fastueuse devant ses yeux — se rende dans une ville représentant, d’une façon générale et caractéristique, le sentiment de l’architecture domestique dans les temps modernes ; qu’il aille, par exemple, à Londres, qu’il monte et descende Harley Street, ou Baker Street, ou Gower Street et que, comparant les deux tableaux, (car tel est le but de notre enquête finale) il considère quelles ont été les causes qui ont introduit dans l’esprit européen un changement aussi radical.


L’architecture de la Renaissance est l’École qui a conduit les facultés humaines d’invention et de construction du Grand Canal à Gower Street, de la colonne de marbre, de l’élégant arceau, des feuillages entrelacés, de l’harmonie brillante et fondue de l’or et de l’azur à la cavité carrée des murs de briques. Étudions donc les causes et le développement de ce changement et tâchons de pénétrer la nature de la Renaissance comme nous avons tenté de le faire pour l’art gothique.


Quoique l’architecture de la Renaissance se montre sous des formes différentes dans divers pays, nous pouvons la classer sous trois titres : la première Renaissance, qui introduit des éléments de corruption dans l’École gothique ; la Renaissance romaine, qui est la perfection du style et la Renaissance grotesque, qui est la corruption de la Renaissance elle-même.