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d’accorder sa légitime valeur aux témoignages de ces grands poètes et de ces grands hommes unanimes, comme vous le voyez, sur cette question. Je veux vous demander si l’on peut supposer que ces hommes, dans les plus hautes œuvres de leurs vies, s’amusent à se créer des idées imaginaires et vaines sur les relations de l’homme et de la femme ; que dis-je, imaginaires et vaines ? bien pis que cela, car une chose peut être imaginaire et cependant désirable si elle est possible, tandis que leur idéal de la femme n’est, si nous nous en rapportons à nos idées courantes sur le mariage, rien moins que désirable. La femme, disons-nous, ne saurait guider personne, ni même penser pour elle-même. L’homme toujours doit être le plus sage ; il est celui qui pense et qui gouverne ; le supérieur en savoir et en jugement, comme en pouvoir.

64. N’est-il pas de quelque importance de nous faire un avis sur cette question ? De ces grands hommes ou de nous-mêmes, lesquels se trompent ? Shakespeare et Eschyle, Dante et Homère habillent-ils des poupées pour nous, ou ce qui est pire, ont-ils des visions contre nature, dont la réalisation, si jamais elle était possible, apporterait l’anarchie dans tous les foyers et causerait la ruine de toutes les affections ? Mais si vous admettez qu’il en puisse être ainsi, prenez du moins l’évidence des faits donnée par le cœur humain lui-même. Dans tous les siècles chrétiens remarquables par leur pureté et leurs progrès, il y eut de l’amant envers sa maîtresse abandon absolu, obéissance dévouée. J’ai