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donne de temps en temps de grandes fêtes, passe l'été dans une ville d’eaux à la mode (jamais sur sa ferme), s’occupe ou prétend s’occuper de politique, se fait élire au Parlement ou au conseil municipal ; en un mot, il mène la vie du « signore » italien[1] »

On voit que ce fermier semble s’occuper fort peu d’agriculture. En effet ce n’est pas un fermier-cultivateur, c’est un mercante di campagna, un marchand de campagne, un fermier général, un commerçant beaucoup plus qu’un cultivateur. Souvent d’ailleurs il afferme plusieurs domaines et, à cet égard, on a pu noter, au cours du XIXe siècle, une concentration très marquée du fermage. Sombart estime que, vers 1890, une dizaine de fermiers se partageaient la moitié de l’Agro romano et que leur nombre total ne dépassait pas une centaine. Souvent même le fermage des immeubles ruraux n’est qu’une partie de leurs affaires ; certains ont des entreprises de toute nature et s’occupent d’opérations de Bourse. Les aptitudes commerciales leur sont beaucoup plus nécessaires que les capacités techniques.

Voici, en effet, de quelle façon le fermier mène son exploitation. S’il y a des bois sur le domaine, il vend les coupes sur pied à un fabricant de charbon ou à un marchand de bois ; il afferme à tant par tête à des bergers venus de la montagne le pâturage sous les arbres. Il vend de même le foin sur pied à des marchands de fourrages qui se chargent de clore le terrain qui leur est réservé

  1. W. Sombart, La Campagna romana, p. 85.