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LE CENTURION

— « Jetez le filet à la droite de la barque, continua la voix inconnue, et vous trouverez ».

Jean se pencha vers Pierre et dit : « C’est le Seigneur ! » Toujours impulsif sous l’aiguillon de sa foi ardente, Pierre s’élança dans la mer et nagea vers le rivage, pendant que les autres jetaient le filet à la droite de la barque.

En un instant, le filet fut rempli de poissons, et c’est avec peine qu’on put le traîner jusqu’à la rive.

Oh ! le grand et beau jour ! Il était revenu vers eux le Maître adoré, et les merveilles et la douce vie commune d’autrefois allaient recommencer. L’admiration, l’amour et toutes les saintes allégresses de l’amitié remplissaient les cœurs des convives dans ce frugal déjeûner qu’une douce aurore d’avril caressait de ses roses clartés.

Pierre seul redevint soucieux quand le repas lut terminé. Il n’avait pas perdu le souvenir de ses fautes, et le remords n’avait pas cessé de le tourmenter.

Comment se ferait-il pardonner ses trois reniements dans la cour du Grand-Prêtre ? Quels témoignages d’amour pourraient les faire oublier à son Maître ? Voilà ce qu’il se demandait en le regardant tristement, sans parler.

Ce fut Jésus qui rompit le silence :

— Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ?

Pierre sursauta, et baissa les yeux. C’est à moi, pensa-t-il, qu’il pose cette question, et non pas aux