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ment extraordinaires que le monde n’avait jamais entendues : « Je suis le pain de vie… je suis le pain vivant descendu du ciel, afin que celui qui en mange ne meure point… et ce pain que je donnerai, c’est ma chair, livrée pour le salut du monde. »

Les Juifs sont révoltés. Plusieurs disciples mêmes repoussent cette parole comme trop dure.

Et Jésus-Christ reprend : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l’Homme, et ne buvez son sang, vous n’aurez point la vie en vous-mêmes. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle, et moi, je le ressusciterai au dernier jour. »

Il est impossible d’employer des paroles plus claires, plus énergiques, plus absolues. C’est une loi que Jésus-Christ va promulguer. Il veut la publier sous toutes les formes possibles. Il se répète, il multiplie les phrases pour dire la même chose, afin qu’il ne puisse pas y avoir ambiguïté ou malentendu.

Et cependant, il paraît craindre encore que l’on ne donne à ses paroles un sens figuré, et il ajoute : « car ma chair est vraiment une nourriture, et mon sang est vraiment un breuvage. »

On ne peut plus douter de la réalité de cette alimentation merveilleuse ; mais quelle vie donnera-t-elle ? Ce sera une vie qui ne finira pas. Ce sera une vie surnaturelle, puisqu’elle consistera dans une union intime avec Dieu. « Celui, dit-il encore, qui mange ma chair, et boit mon sang, demeure en moi, et moi en lui. » C’est une vie, quasi-divine, ajoutée à la vie naturelle de l’homme, et qui se perpétuera après celle-ci.

Et n’oublions pas, Messieurs, la solennité, de l’institution eucharistique : c’est une institution testamentaire. C’est un legs que Jésus fait à l’humanité quelques heures avant de mourir. Il arrive souvent qu’un grand homme en mourant, lègue son corps à sa ville natale, ou à sa patrie ; mais c’est un corps en pourriture et qui ne sera bientôt plus qu’une vile poussière.

Un don de ce genre serait-il digne d’un Dieu ?

— Évidemment non. En léguant son corps il le fera donc incorruptible et immortel.

Il prend dans ses mains divines du pain, et une coupe de vin, et les présentant à ses apôtres il leur dit : « Ceci » (il ne dit pas ce pain) est mon corps ; « Ceci » (il ne dit pas ce vin) est mon sang… C’est ma chair livrée pour le salut du monde ; mangez-en tous… Et ce que Jésus vient de faire, le sacerdoce nouveau institué par lui, reçoit l’ordre de le faire en mémoire de lui, dans la suite des siècles.

Ainsi s’est faite l’institution eucharistique qui change réellement le pain et le vin en la substance même de Jésus-Christ.


V


Messieurs, ils sont bien malheureux ceux qui, comme nos frères séparés, rejettent cette consolante réalité, pour se contenter d’un vain simulacre ou d’un simple souvenir.