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Il se nommait Christophe Colomb, et c’est dans cette salle qu’après l’avoir entendu, le roi et la reine d’Espagne lui remirent enfin tous les pouvoirs qu’il demandait, pour le monde inconnu qu’il allait ouvrir à la civilisation chrétienne.

Il deviendrait fastidieux de pousser plus loin la description de toutes les beautés de l’Alhambra. Car chaque tour en contient de nouvelles, et leur énumération seule serait un long travail.

Qu’il me suffise d’ajouter qu’à l’intérieur de ces tours, dont l’extérieur a l’aspect sévère et formidable de forteresses, il y a des boudoirs où tout invite au plaisir et à l’amour. L’art mauresque y a prodigué des ornements et des décors, qui ont quelque chose du rêve.

C’est idéal, fantastique, féerique, comme les visions que doivent avoir les fumeurs de kif, et les buveurs d’opium.

La symétrie en est sensible, mais à peine visible, tant le mouvement donne de variété et de grâce à ses lignes capricieuses et légères.

Les formes sont réelles, et cependant l’on croirait que c’est une illusion d’optique qui déroule ses jeux fantaisistes dans une lumière voilée, et que tout cela va s’évanouir quand apparaîtra la réalité.

Quel magique coup d’œil devaient donc offrir ces palais quand les sultanes animaient leurs splendeurs, et variaient leurs perspectives, quand des eaux parfumées jaillissaient de toutes ces fontaines, quand les fleurs ornaient ces niches, quand des tentures de soie