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« Il était formé par une galerie circulaire de colonnes de marbre blanc, surmontées de chapiteaux dorés. Les portes étaient d’ébène et d’olivier. Du milieu d’une conque de porphyre s’élançait un jet de vif argent, qui en retombant, reflétait les rayons du soleil, et jetait des éclairs dont l’œil avait peine à soutenir l’éclat.

« Dans presque toutes les salles il y avait des fontaines et des bassins de marbre ou de jaspe. On voyait dans la salle qu’on appelait du califat, une conque du plus beau jaspe remplie d’eau, au milieu de laquelle était un cygne d’or d’un travail admirable… »

Un tel palais devait être féerique, et s’il n’était pas décrit dans presque tous les historiens, on serait tenté de le regarder comme une invention due à la brillante imagination des orientaux.

Abd-el-Rhaman III mourut à l’âge de soixante douze ans, et laissa sur le trône son fils El-Hakem, alors âgé de quarante sept ans.

Ce calife fut moins belliqueux que son père. Il favorisa l’agriculture et les lettres, et mourut après quinze années d’un règne pacifique et glorieux.

Son fils, âgé de dix ans, fut proclamé émir ; mais il n’eut toujours que le titre de souverain et n’en exerça jamais la puissance. Mohammed-ben-Abi-Ahmer fut nommé hadjeb, on vice-roi, et ce fut lui qui gouverna réellement avec un éclat et une puissance, dont on retrouve les souvenirs dans le romancero espagnol.

Il y est toujours désigné sous le nom d’Almanzor, ou El-Mansour, le Victorieux. Car il fut surtout un grand homme de guerre, et son règne fut terrible pour les chrétiens.