Page:Routhier - À travers l'Espagne, lettres de voyage, 1889.djvu/397

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 400 —

dont la taille mesurait probablement 8 pieds de circonférence. C’était l’idéal de la beauté !

Remarquez bien que, suivant la coutume, on avait dû pendant les six mois précédents, la soumettre à un régime particulier, destiné à produire ce résultat. Aussitôt que le mariage d’une jeune fille est décidée, on la renferme dans une chambre obscure, où elle mange des farineux et dort. Au bout de quelques mois, elle en sort énorme, c’est-à-dire belle. Cela me rappelle qu’autrefois on engraissait les victimes avant de les conduire à l’autel des sacrifices !

Le seul avantage que je trouve dans cet embonpoint des juives de Tunis, c’est qu’on ne pourrait pas facilement les enlever. Cet avantage serait peut-être appréciable, même en Canada ; car s’il faut en croire les journaux (qui ne mentent jamais), il se rencontrerait parmi nous, de temps en temps, des femmes qui manquent de poids, et dont l’enlèvement est possible.

Un des quartiers les plus intéressants de Tunis est celui des soukhs ou bazars. Nous nous engageons dans un enchevêtrement de ruelles et de passages à arcades, généralement voûtés, et flanqués de balcons enfoncés, ou de niches où se tiennent les marchands, assis sur des comptoirs, les jambes croisées. Ici sont les parfums et les essences ; là sont les cuirs, les sachets, les babouches, les ceintures plus loin sont les tissus de soie et de coton, les tapis en poil de chameau ; ailleurs sont les bijoux et les objets d’art ; et les bazars succèdent aux bazars à perte de vue.