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coutumes et de religion offre constamment à l’observateur quelque spectacle nouveau, et des contrastes vraiment curieux.

De Constantine à Bône, le chemin de fer traverse d abord un pays dénudé et de pauvre apparence. Mais bientôt la végétation apparaît, et l’olivier verdit sur les coteaux. Aux bords de l’oued Zenati, les lauriers roses poussent par touffes et les lis tapissent les gazons.

En approchant de Djebel Thayci, la végétation devient plus riche encore : les acacias d’Australie et les amandiers sont en fleurs. Après Nador, les montagnes s’abaissent, de grands troupeaux gardés par des Arabes paissent au loin, les figuiers de Barbarie sont couverts de fruits rouges, les jujubiers sauvages disparaissent et font place aux vignes. Nous arrivons à Bône.

Quel site enchanteur ! Quelle jolie baie lui sert de miroir ! Quelle promenade charmante, longeant la mer, bordée de caroubiers et de nopals ! Mais quelle petite ville moderne ennuyeuse pour ceux qui recherchent les villes orientales !

De grandes rues tirées au cordeau, de larges trottoirs, de grandes places vides, des boutiques, des cafés, des hôtels, des façades uniformes, toutes les banalités d’une ville de province de troisième ordre.

En revanche, Bône est une place d’eau dont le climat et la salubrité doivent être bien préférables à ceux de Nice et de Cannes, et la végétation qui l’entoure est la plus admirable que l’on puisse voir.