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Après deux jours de voyage en diligence et en chemin de fer lions arrivons à Constantine — apparition fantastique, ville étrange, jetée comme une énigme sur un roc escarpé, et entourée d’un abîme au fond duquel gronde le Rummel. Singulier phénomène que ce fleuve qui a creusé son lit sous une montagne, et qui enlace la cité comme un serpent monstrueux ! Qui nous dira les mystères de son gouffre profond où l’on précipitait autrefois les femmes adultères ?

Constantine est beaucoup plus orientale, qu’Alger, quoiqu’elle ait aussi son quartier européen. Elle est aussi plus pittoresque, et ce n’est pas peu dire. Ses rues populeuses sont grouillantes de vie arabe, et du haut de ses remparts l’œil contemple d’admirables vallées où gisent les ruines de vingt siècles.

Le palais du général commandant — ancienne demeure du bey — est dans le style mauresque ; et comme foutes les constructions de ce genre, il est surtout remarquable par ses promenoirs à colonnes. Autour des patios, les murs sont peints de fresques grossières, œuvre d’un prisonnier que le bey força à peindre sous peine de mort.

La cathédrale catholique est une ancienne mosquée, dont le mirhab a été transformé en un autel dédié à la sainte Vierge.

La mosquée de Mal ah Bey mérite une visite. Sa jolie colonnade de marbre, ses murs en stuc ciselé, ses coupoles peintes, son plafond en cèdre sculpté où pendent un-grand nombre de lustres et de lampes offrent à l’intérieur un très beau coup-d’œil.