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qu’il s’étend dans l’intérieur, et fait des prosélytes parmi les Nègres.

Je m’étonnais de la durée de l’Islamisme, et des entraves qu’il réussissait à maintenir contre l’expansion de la civilisation ; et il me répondait que cela s’expliquait par l’ignorance dans laquelle les marabouts et les chefs tiennent le peuple. Le dogme est le privilège de ces deux castes, et c’est ce qui assure leur suprématie et la durée de leur domination.

Si les lumières de la civilisation chrétienne pouvaient pénétrer dans la classe populaire, l’autorité des gouvernants et l’influence des marabouts seraient bientôt ruinées. Mais le peuple et surtout les femmes sont soigneusement tenus dans les ténèbres de là plus grossière ignorance.

Le triste sort de ces populations innombrables m’affligeait. Je me laissais glisser sur la pente de la rêverie, et je comparais Mahomet à Jésus.

Mahomet est Arabe, et ce qu’il veut c’est la domination arabe ; la religion qu’il fonde c’est une religion nationale, et s’il avait pu vaincre l’Europe, elle serait devenue une immense Arabie.

Jésus est juif de naissance ; mais, dans sa vie publique, dans sa prédication, dans sa doctrine, il n’est ni juif, ni arabe, ni romain, ni grec ; il est homme, il s’adresse à l’humanité toute entière sans distinction de races, de pays, ni de langages, et la vérité qu’il enseigne convient : à tous les peuples :

Mahomet ne convertit pas les hommes à sa doctrine ; il la leur impose par la force brutale. Il a des armées