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de grandes aiguilles, marchant nu-pieds sur le feu, et sur le tranchant d’un sabre.

On affirme que les jours de grande fête un agneau tout vivant est apporté à l’aïssaoua qui le dévore à belles dents, et le mange en entier, os, chair, peau et laine.

Si tous ces sortiléges ne m’ont pas émerveillé, j’ai été bien étonné en revanche de découvrir que leur nom signifie disciples de Jésus. Aïssa est l’un des noms arabes qu’on donne à Jésus, et oüas, signifie disciples. Dans leurs croyances, Aïssa fut un marabout célèbre qui domptait les serpents, changeait l’eau en vin et faisait apparaître soudainement devant lui des tables somptueusement servies. N’est-ce pas bien là le Christ vainqueur du serpent, multipliant les pains et opérant le miracle de Cana ? N’est-ce pas bien le Christ prédisant à ses disciples qu’ils prendraient impunément les serpents dans leurs mains ?

Singulier rapprochement, n’est-ce pas, entre le divin fondateur du Christianisme, et ces faux thaumaturges qui prétendent faire des miracles en son nom !

Un autre spectacle assez curieux auquel on peut assister tous les mercredis, sur une grève appelée le rocher de Cancale, à deux milles d’Alger, ce sont les sacrifices de coqs.

Vers huit heures du matin, on y voit arriver des femmes et des jeunes filles, mauresques, juives et négresses, qui désirent connaître leur avenir, et se rendre