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tation de nous arrêter à Blidah, la séduisante ville des orangers.

Elle est très agréablement située aux pieds de l’Atlas, entourée de jardins et d’immenses orangeries ; et elle possède un dépôt de remonte pour la cavalerie française où j’ai vu les plus beaux chevaux du monde.

Son jardin Bizot est délicieux, et son Bois sacré mérite une visite.

Une des grandes attractions de Blidah, ce sont les gorges de la Chiffa, déchirure étroite et profonde dans la chaîne de l’Atlas, où nous conduit une route des plus pittoresques, suspendue comme une corniche à mi-hauteur des rochers, au-dessus de l’abîme où gronde la rivière. C’est là que nous avons eu le plaisir de rencontrer une troupe de singes, qui ont bien voulu nous donner une représentation gratis. Ces sémillants, quadrumanes, que Darwin et les évolutionnistes veulent nous donner pour ancêtres, étaient au nombre de quarante ou cinquante de toutes tailles, et paraissaient réunis en séance au bord du torrent comme une chambre de députés.

Sur une roche élevée, un vieil orang-outang solidement assis semblait présider, et je crois même que les débats de ses collègues l’avaient endormi. Au-dessous, une autre roche servait de tribune, où les préopinants se succédaient rapidement, non sans lutte. Le débat était tumultueux et manquait un peu de décorum. Plusieurs faisaient des cabrioles que les politiciens les plus souples ne sauraient exécuter. Bien différents des conférenciers, ils se lassèrent de s’exhiber