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Sous le régime de la civilisation, les rôles sont un peu changés, et il arrive assez souvent maintenant que ce sont les jeunes filles qui, au moyen d’une dot engageante, se paient le luxe d’un mari. On dit même, mais je ne le crois pas, qu’il se rencontre des jeunes gens qui se laissent volontiers acheter de cette manière.

Pendant que nous discourons sur les femmes arabes, nos compagnes de voyage sont sorties du harem ; et après avoir vu de nouveau défiler la procession de la circoncision, nous revenons à notre hôtel par des rues indescriptibles. À Tanger, la voierie est confiée aux chiens et aux oiseaux de proie, et naturellement ils n’enlèvent que ce qui est mangeable. C’est là que l’on apprend à apprécier notre régime municipal et notre comité des chemins.

Mais, dans ces rues malpropres, il y a des bazars pleins d’intérêt, des boutiques remplies de riches étoffes, de broderies et de dentelles magnifiques, d’ouvrages en cuir marocain, de vieilles faïences, d’armures antiques, et des mille objets que produit l’art oriental. C’est une grande tentation pour les femmes, et nous avons quelque peine à en arracher nos compagnes de voyage.

Je vous ai dit que plus la femme arabe se cache, et plus on désire la voir. Naturellement, ce désir est la grande tentation des touristes européens, et il en résulte toutes espèces d’aventures.

Il y avait parmi nos compagnons de voyage à Tanger, un Français et un Allemand qui s’amusaient