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des réceptions, des dîners dans son palais ; il y invite même les dames européennes, qui après le dîner peuvent être admises dans le harem. Mais il ne permet jamais à ses femmes de paraître devant ses invités du sexe fort ; et si par hasard nous pouvons les apercevoir au jardin, ou dans quelque galerie intérieure, il nous recommande de ne les pas regarder.

Tant qu’il reste musulman, il n’abandonne pas ces usages ; seulement la civilisation le fait renoncer graduellement à la polygamie ; et aujourd’hui il y a plusieurs musulmans haut placés qui n’ont qu’une femme, ou qui en ayant plusieurs, ne vivent qu’avec une seule. La polygamie subsistera plus longtemps parmi les pauvres que parmi les riches, pour l’excellente raison que la femme coûte cher au riche, tandis que par son travail elle rapporte au pauvre.

La grande dame musulmane vit dans l’oisiveté, et consacre tout son temps à s’habiller, se farder, se parfumer, se peindre les yeux avec du kohl, les ongles avec du henné, et se tatouer enfin de diverses manières.

Mais comment se font les mariages, me diront les jeunes filles, puisque les femmes ne sortent jamais, ne reçoivent jamais, ne laissent voir que leurs yeux quand elles sont obligées de sortir, et ne parlent jamais à un homme ?

Voilà l’étonnant, c’est que les jeunes filles arabes se marient tout de même, malgré les désavantages évidents de cet état de société.

Vous connaissez sans doute le proverbe oriental : la femme est comme votre ombre ; courez après, elle se