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or, il en fait tant à la veille de ses noces, que sa fiancée avertie l’invite à rester dans le célibat dont il voulait sortir.

Parmi les saynètes de fantaisie, il y a les Fioles de l’oubli qui est une spirituelle boutade. Un charlatan vend de l’eau du fleuve Léthé, et les gens se battent pour en acheter ; les coquettes pour oublier leurs amours de la veille, les hommes d’État pour oublier leurs programmes, et les parvenus pour effacer de leur mémoire leur origine roturière et misérable.

Vraiment, l’eau du Léthé est-elle bien nécessaire pour rendre ces gens oublieux ?

Dans un saynète intitulé « l’Héritier extravagant » Ramon de la Cruz a mis en scène un paysan qui vient d’hériter de son frère, et qui veut dès lors changer son train de vie. Puisqu’il est devenu riche, il veut vivre comme un grand seigneur.

Il suffira d’en citer deux scènes pour donner l’idée du genre.

Diégo revient de Madrid, où son frère est mort, et où il a passé plus d’un mois. Marica, sa femme, l’attend depuis longtemps, lorsqu’il arrive enfin portant une belle perruque, et accompagné d’un laquais nommé Pedro, mis à la française :

Diego.

Voici ma maison, jeune homme, et celle que j’aperçois est ma femme, señora dona Marica ?

Marica.

C’est mon mari ! que signifie cela ? et quel scandale