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naires, les tendres amours, les passions romanesques, la vertu persécutée, la perversité châtiée, et autres actes privés qui ne s’accomplissent que dans le foyer domestique, et pour cela même ne peuvent être observés que là.

« Ces trois classes de compositions dramatiques ainsi divisées furent celles qui, avec plus ou moins de succès, se cultivèrent en Espagne, depuis le milieu à peu près du dix-huitième siècle jusques après les premières années du dix-neuvième. »

Parmi les poètes comiques de cette époque nous devons une mention spéciale à Ramon de la Cruz qui vint même avant Moratin, et dont les œuvres publiées vers 1789 forment dix volumes.

Sans doute, il n’a pas la brillante imagination des grands dramatistes dans l’invention des intrigues et le jeu des situations dramatiques ; mais il possède un grand esprit d’observation, de la verve, et beaucoup de vivacité dans le dialogue.

Ses tragédies et ses drames forment une collection plus volumineuse que remarquable. Mais ses saynètes le rapprochent de Molière. Ils sont piquants et pleins de vie, en même temps qu’ils sont une peinture fidèle des mœurs populaires.

M. Antoine de Latour, qui est un juge excellent des œuvres littéraires de l’Espagne, dit : « de même que la tragédie est à Corneille, la comédie à Molière, la fable à La Fontaine, la chanson à Béranger, le saynète appartient à Ramon de la Cruz. Il lui a donné sa forme dernière, et par l’observation, la verve et le sens moral,