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pieds. (à part) Mais quoi ! si je m’éveille auparavant, pourquoi parler d’une chose qui ne sera point réalisée ? »


Mais, cette fois, le prince se contient. Il réprime les mouvement de sa nature mauvaise, et il suit les soldats en disant :

« Allons, Fortune, marchons vers le trône, et si je dors, ne me réveille pas, et si je veille, ne me replonge pas dans le sommeil ! Mais que tout cela soit une vérité ou un rêve, l’essentiel est de se bien conduire : si c’est la vérité à cause de cela même, et si c’est un rêve, afin de se faire des amis pour le réveil. »


Plus il réfléchit, plus il comprend qu’il doit bien se conduire. Convaincu que tout ce qu’il voit n’est qu’un rêve, il ne pense plus qu’aux biens invisibles et éternels.

Bientôt son armée triomphe, et le roi vaincu, son vieux père, vient se livrer entre ses mains.

Alors le prince adresse aux Polonais un discours plein de sagesse dans lequel il démontre que son père a mal agi à son égard, qu’il a été injuste et cruel pour son fils, que ce n’est pas ainsi qu’il aurait dû corriger son caractère farouche, et, tendant la main au vieillard agenouillé il lui dit : « vous devez être convaincu maintenant que vous n’avez pas interprété comme il fallait la volonté du ciel. Pour moi, je m’humilie devant vous, mon père et mon roi, et sans essayer de me défendre, j’attends votre vengeance. »