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Le projet du roi est mis à exécution. Un narcotique puissant est administré au prince qui s’endort d’un sommeil léthargique ; et quand il se réveille, il est dans un palais somptueux, dans le brocart et la soie, entouré de valets qui le servent. Son vieux professeur lui apprend alors qu’il est le prince héritier de la couronne, et pourquoi il a été tenu renfermé depuis son enfance.

En apprenant cette nouvelle le prince entre en fureur, et non seulement il condamne à mort son vieil ami, mais il veut le tuer de ses mains. Les valets s’interposent, mais il menace de les jeter par les fenêtres.

Les courtisans sont traités de la même manière, et quand on lui parle de justice, il répond qu’il n’y a de juste que son bon plaisir.

Un valet ose lui résister, il le saisit et le précipite du haut d’un balcon.

Enfin son père se présente, et il le repousse en lui disant : « Je me passerai de vos embrassements comme j’ai fait jusqu’à ce jour. Que m’importent après tout les caresses d’un père qui m’a traité avec tant de rigueur, qui m’a fait élever parmi les bêtes sauvages et m’a renfermé comme un monstre ! »

Vient une dame de la cour, remarquable par sa beauté. Le prince lui fait une déclaration d’amour, et comme elle veut se retirer, il lui commande brutalement de rester.

« Vous n’oseriez, ni ne pourriez manquer aux égards que vous me devez, dit-elle.

« — Ne serait-ce que pour vous montrer que je le puis, je suis capable de perdre le respect que je vous dois ; car je suis porté à faire tout ce qu’on me dit être au-delà