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organisées en bandes, et pratiquaient le brigandage contre les fils du Prophète, partout où ils les rencontraient. Ce genre de brigandage s’est souvent reproduit en Espagne depuis lors, et l’on a appelé ces bandes organisées guerrillas.

Les guerrilleros d’autrefois n’étaient pas toujours des saints, mais ils croyaient faire œuvre pie en pillant et dévastant, et ils faisaient dire des messes pour le succès de leurs entreprises.

Un des héros de Cervantes, dans son roman « Rinconnet et Cortadille » dit à un jeune homme :

« Vous êtes donc voleur ?

— Oui, pour servir Dieu et les honnêtes gens.

— Peut-on servir Dieu ainsi ?

— Seigneur, je ne me mêle point de théologie, mais chacun doit le servir dans l’état auquel il est appelé. »

Sans contredit, ces brigands valaient beaucoup mieux que bien des honnêtes gens de nos jours qui font fortune dans les intrigues politiques et dans l’agiotage.

Certes la politique d’alors était bien différente ; et parmi les gouvernants du jour il en est bien peu qui pourraient dire comme Charles-Quint : « Je veux que la récompense aille au-devant du mérite, et non que le mérite soit forcé de solliciter la récompense ! »

Un autre côté fort intéressant des mœurs de ce temps-là se trouve dans le dernier duel en Espagne, l’une des plus belles comédies de Calderon. Le poète y a mis en scène de curieux détails sur les usages de la chevalerie et les combats en champ clos.