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Il aime une demoiselle très riche qui lui apporterait en dot de quoi dîner tous les jours de sa vie ; mais elle est fille d’un plébéien ! Fi !

Un jour, il frappe son valet et lui casse deux dents. Nuño, le valet, lui répond : « Vous avez très bien fait, ce sont des meubles inutiles quand on est à votre service » — Viens me donner mes armes, demande-t-il — Et Nuño reprend : « mais, mon maître, je ne vous en connais d’autres que celles qui sont sur la porte de votre maison. »

Et, quel langage il parle ! La belle qui paraît le soir à son balcon, est pour lui, « le soleil, couronné de diamants qui recommence sa carrière, et qui se lève aujourd’hui à l’heure où il se couche ordinairement. »

Elle lui dit des injures ; il lui répond que « ses rigueurs l’embellissent, et que sa colère est un ornement. »

Du reste, les valets ont, comme les maîtres, leurs défauts, et le poète les stigmatise finement.

— « Faites-moi mon compte, dit l’un d’eux à son maître, je prends congé de vous. Vous avez commis une injustice criante à mon égard. »

— Qu’est-ce qu’il y a donc ? demande le maître.

— Depuis un an vous êtes en amour, et vous ne m’avez pas même dit le nom de votre belle. Le nom de la Dame, ou je pars » ?

On questionne un domestique sur une aventure galante de son maître :

— « Je suis son valet, répond-il, je vous la dirais, même sans la savoir ! »