Page:Routhier - À travers l'Espagne, lettres de voyage, 1889.djvu/240

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 241 —

FRÉDÉRIC.

Ô Vénus traîtresse !
Si tu prétends au voyageur
Dérober son or et son cœur,
Pourquoi te donner tant de peine ?
Qu’as-tu besoin d’être inhumaine ?
Retiens, retiens pour tes beaux yeux,
Ce feu qui leur convient bien mieux ;
Désarme-toi je t’en supplie,
Je t’ai déjà donné ma vie,
Veux-tu faire deux fois mourir
Celui que rien ne peut guérir ?
..............................
Quand le bandit est en vedette,
Et laisse voir son escopette,
Le passant demande humblement
La vie en donnant son argent.
Charmant bandit, moi je te donne
Aussi mon âme et ma personne ;
Mais je veux vivre, accorde moi
La vie, elle est toute pour toi.
Je tiens à mes bras pour te prendre,
À mes oreilles pour t’entendre,
À mes deux yeux pour t’admirer,
À tout mon cœur pour t’adorer.
..............................
Othon, notre grand empereur
Chasse aujourd’hui dans ce parage,
Et logera dans ce village.
Je crains qu’il ne vous voie ici ;
..............................
Je veux dérober votre vue
À toute rencontre imprévue.
Cachez vous ! mon amour a peur
Que ce tout puissant empereur
Ne vous voie !… Il a l’humeur tendre
Et le cœur si facile à prendre !
..............................