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étroites, des maisons jaunies, des toits en tuiles brunes, des fenêtres grillées et des balcons en fer. Ruine imposante, son vieux château est perché sur une montagne escarpée, et semble pleurer dans la solitude et la désolation les souvenirs de François i, de Jeanne la Folle, et de Charles-Quint. Les bastions écroulés servent aujourd’hui de refuge à quelques familles de Gitanos.

Sans égard pour la mémoire de Gambetta, dont le séjour a augmenté la célébrité de Saint-Sébastien, nous traversons cette ville sans nous y arrêter. Elle occupe une position des plus agréables, entourée d’un amphithéâtre de montagnes, avec une échappée de vue sur la mer.

Nous faisons nos adieux à l’Océan, car nous ne le verrons plus qu’à Cadiz, et nous entrons dans les Pyrénées dont les cimes neigeuses découpent l’horizon.

Le chemin de fer suit les sinuosités de la rivière Urumea, profondément encaissée dans les montagnes, et de distance en distance il s’engage résolument dans d’immenses tunnels. La nuit vient, et la couche de neige qui recouvre le sol s’épaissit. Le train se ralentit, et je commence à craindre qu’il ne s’arrête tout-à-fait au milieu de ces gorges profondes et inhabitées. Le froid augmente, et nous grelottons sous nos fourrures.

Heureusement les tunnels se multiplient et s’allongent ; et la marche du train s’y accélère, tandis qu’au dehors les roues de la locomotive glissent sur la neige. À une petite gare, dont les pâles réverbères tremblotent au vent, la porte de notre compartiment s’ouvre, et