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« Cet époux est beau, il est riche, il est sage et d’une illustre naissance, et son père n’est pas moins que tout-puissant.

« Je vous jure que, du côté de sa mère, il est du sang royal, et qu’elle est si bonne qu’il n’y a pas d’attraits ni de vertus qui ne soient en elle.

« C’est une mère pleine de tant de grâces, que c’est par ses mains que Dieu les dispense au monde. Elle est à la fois rose et lys, cyprès et palmier............... »

Puis il raconte la cérémonie des fiançailles en présence des grandes dames et des seigneurs de la cour, et il ajoute :

« Le ciel fermait la porte à mon cœur plein d’amour paternel ; il m’enlevait la meilleure part de mon âme ; et j’étais le seul à plaindre dans cette foule de spectateur.......

« Nous retournâmes à l’église ; la fiancée avait quitté ses habits de fêtes et ses bijoux pour revêtir la bure grossière. La chevelure fut coupée ; car, ainsi que les autres vierges dont le chœur était rempli, elle ne devait plus avoir pour être belle que sa seule beauté.
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« Et celle que j’aimais si tendrement qu’un amant en eût été jaloux, celle que je couvrais de soie et d’or, courba son front comme une rose pâlie, et effeuilla, ce soir là même, la couronne de ses pétales pourprés.

« Elle dormait sur la paille froide et dure ; elle marchait les pieds nus ; son corps était caché sous un vêtement de pauvre ; ses yeux seuls exprimaient son âme !
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