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Laissez-moi vous résumer ici les traits principaux de son héroïque histoire, depuis son origine jusqu’au dix-septième siècle, qui a été l’époque de sa plus grande puissance.

L’Espagne est arrivée alors à de si hautes destinées qu’elle a éprouvé la lassitude de la gloire ; et elle a négligé non seulement d’agrandir cette gloire, mais de la propager. Quand les poètes, les romanciers, les historiens de tous pays accouraient chez elle, et célébraient ses beautés, ses grandeurs et ses vertus, elle seule restait muette.

Les étrangers qui voulaient l’étudier étaient obligés de recourir à des Américains comme Irving, Tiknor, Prescott, et Motley ; à des Allemands comme Wolfe et le baron de Shack ; à des Français comme Mignet, Amédée Pichot, Philarète Chasles, Viardot et Gautier.

Enfin, il y a un peu plus de trente ans, la très noble nation a daigné s’occuper d’elle-même, et elle a trouvé parmi ses enfants des historiens dignes d’elle. Nous voulons parler de don Modesto Lafuente et don Antonio Cavanilles ; celui-ci plus national et plus sympathique au passé, celui-là, plus imbu des idées modernes, et tenant moins compte des mœurs et des passions des âges écoulés.

C’est le premier qu’il faut lire surtout pour bien juger les trois éléments de l’histoire d’Espagne, qui sont l’esprit religieux, l’esprit monarchique et l’esprit d’indépendance nationale.

Comme la France, l’Espagne est issue de races différentes, qui furent longtemps en guerre. Ces races