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réverbères, qui se reflètent dans la mer paisible et qui nous font croire que nous arrivons.

Mais la voie ferrée fait de longs détours, et nous éloigne de Cadix quand nous croyons y entrer.

Pourquoi donc ces longs circuits ? Est-ce pour contourner quelque baie ? Est-ce pour favoriser quelques propriétaires qui ont voulu absolument être expropriés ? Je l’ignore. — « Mais cette dernière raison pourrait, peut-être exister, même en Espagne, dit mon compagnon de voyage ; car nous avons ce proverbe : « chacun approche le charbon de son pain. » Il date de l’époque où l’on faisait cuire le pain sous la cendre, mais il s’appliquerait très bien aux hommes politiques qui font construire des chemins de fer, et qui choisissent toujours le tracé le plus rapproché de leurs propriétés.

Enfin, nous sommes à Cadix, que l’on a surnommée la coupe d’argent, à cause de sa blancheur que son cadre d’azur fait ressortir. Mais il fait nuit, et, quoique la lune monte à l’horizon, nous ne pouvons guère juger de l’aspect de la ville.

Après souper, nous allons, attirés par la musique de la mer, parcourir les terrasses de l’Alameda d’où la vue s’étend au loin sur l’océan.

La description de Fernan Caballero est fidèle : « C’est une promenade enchanteresse par une nuit d’été, quand les étoiles brillent au ciel et les femmes sur la terre, quand la brise pure et fraîche de la mer, nous caresse le front comme le baiser d’une mère, quand les vagues dorées par la lune sous leur écume d’argent semblent