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celle des taureaux, celle des chevaux, celle des toreros, et celle des hommes qui annoncent le spectacle.

« Le cirque est plein et offre un spectacle merveilleux. C’est un océan de têtes, de chapeaux, d’éventails, de mains qui s’agitent dans l’air ; du côté de l’ombre, où est le beau monde, c’est tout noir ; du côté du soleil, où sont les petites gens, ce sont mille couleurs vives de vêtements, d’ombrelles, d’éventails de papier, une immense mascarade… Ce n’est pas un bourdonnement, un bruit comme dans les autres théâtres ; c’est autre chose, c’est une agitation toute particulière au cirque ; les gens crient, s’appellent, se saluent avec une gaieté frénétique ; les enfants et les femmes piaillent, les hommes les plus graves folâtrent comme des adolescents ; les jeunes gens, par groupes de vingt, de trente, chantant en cadence, et frappant de leurs cannes sur les gradins annoncent l’heure au représentant de la municipalité…

« La trompette sonne ; quatre gardes du cirque, à cheval, avec le chapeau et le panache à la Henri IV, le petit manteau noir, le justaucorps, les bottes et l’épée, entrent par la porte qui est sous la loge du roi et font à pas lents le tour de l’arène ; la foule se retire, chacun s’en va à sa place, l’arène reste vide.

« Les quatre cavaliers vont se mettre deux par deux devant la porte encore fermée qui fait face à la loge royale. Les dix mille spectateurs ont l’œil dessus, on fait silence ; de là doit sortir la Cuadrilla, tous les toreros en grand costume, qui viennent se présenter au roi et au peuple.