Page:Routhier - À travers l'Espagne, lettres de voyage, 1889.djvu/144

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 145 —

inculpé, qui par son recours à Rome, n’ait pas amélioré son sort. L’histoire de l’Inquisition dans ce temps-là se trouve remplie de contestations, survenues entre les rois et les papes, et l’on découvre constamment chez le Souverain Pontife le désir de contenir l’Inquisition dans les bornes de la justice et de l’humanité. La ligne de conduite prescrite par Rome ne fut pas toujours suivie, comme il l’aurait fallu ; aussi voyons-nous les papes accueillir une multitude d’appels, et mitiger le sort qui serait échu aux prévenus, si leur cause eût été jugée définitivement en Espagne.

« Le pape, à la sollicitation des rois catholiques, qui désiraient que ces causes fussent jugées en dernier ressort en Espagne, nomme un juge d’appel ; le premier de ces juges est Don Tingo Manrique, archevêque de Séville. Cependant, au bout de très peu de temps, le même pape dans une bulle du 2 août 1483, dit avoir reçu de nouveaux appels faits par un grand nombre d’Espagnols de Séville, lesquels n’ont osé s’adresser au juge d’appel, dans la crainte d’être arrêtés. Telle était alors l’exaltation des esprits, tel était le penchant aux injustices ou aux mesures d’une sévérité excessive. Le pape ajoute que quelques-uns de ceux qui ont recours à sa justice ont déjà reçu l’absolution de la pénitencerie apostolique, et que d’autres ne tarderont pas à la recevoir ; il se plaint ensuite qu’on n’ait point assez tenu compte à Séville des grâces récemment accordées à divers accusés ; enfin, après quelques autres avertissements, il fait remarquer aux rois Ferdinand et Isabelle que la miséricorde envers les coupables est plus agréable