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l’inspiration d’un poète, et la vision d’un prophète. Ce n’est plus, comme on l’a dit des anciens cénobites, un homme qui achève de mourir ; c’est un ressuscité dont l’horizon s’agrandit et devient radieux ; il ne marche pas, il plane ; il ne parle pas, il chante, comme le saint roi David, et sa Somme Théologique devient une lyre. Un pape, un cardinal, et deux évêques sont à ses pieds, lisant ses œuvres avec une admiration pleine d’étonnement ; et, sur un plan inférieur, Charles-Quint et plusieurs religieux, agenouillés, demandent au Souverain-Pontife de le mettre au nombre des docteurs de l’Église.

Murillo, qui fut un enfant de Séville, et dont la statue orne la petite place qui fait face au musée, y compte aussi plusieurs tableaux, entre autres, Saint François d’Assise embrassant le Crucifix, et deux Immaculées Conceptions.

Ce dernier sujet a été bien des fois traité par le grand peintre catholique de l’Espagne, et il a fait aussi bien des Madones et plusieurs Saintes Familles. Il répondait à un besoin de son pays où le culte de la Sainte Vierge est aussi répandu qu’en Italie.

À Séville, les Serenos, qui nous annoncent le temps qu’il fait pendant la nuit, préludent à leurs chants par ce motet : Ave Maria purissima !

Il y a quelques années, des esprits forts avaient réussi à faire supprimer ce prélude ; mais les habitants et surtout les dames de Séville réclamèrent auprès du Conseil-de-ville, et le chant a été rétabli. « Vous ne sauriez croire, raconte Fernan Caballero, l’émotion et l’allégresse que l’on éprouva lorsqu’on entendit de nouveau la