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romain à Jérusalem. On attribue cette fantaisie à don Fadrique Henriquez de Rivera, au retour d’un pèlerinage en Terre-Sainte.

Quoi qu’il en soit, cet édifice d’architecture arabe est très curieux à voir, et rappelle la plupart des souvenirs de la Passion de Jésus-Christ. Une belle et grande salle se nomme le prétoire, et une autre plus petite mais richement ornée est le cabinet de Pilate.

Il est d’autres palais encore à Séville qui gardent des souvenirs de Cervantès, de Calderon, de l’Inquisition ; mais je ne veux pas m’attarder dans leur description, et je préfère vous dire un mot du musée.

Il est assez pauvre comme édifice ; mais il est riche en peintures. On peut y admirer de nombreux chefs-d’œuvre signés Herrera, Pacheco, de las Roelas, de Vargas et Zurbaran. Ce dernier surtout m’a émerveillé.

Déjà, j’avais fait connaissance avec Zurbaran au Musée de Madrid ; mais c’est ici que je l’ai mieux connu. J’avais remarqué qu’il représentait avec des couleurs plus sympathiques que les autres peintres les figures amaigries des anachorètes. Il me semblait que les moines et les solitaires n’avaient pas de portraitiste plus fidèle.

Mais en voyant son Apothéose de saint Thomas d’Aquin, au Musée de Séville, j’ai compris qu’il avait une autre manière que les autres artistes de peindre la vie religieuse.

Son saint Thomas n’est pas un ascète accablé par les rigueurs de la pénitence. Toute sa tête rayonne dans son capuchon de bure, et ses yeux illuminés expriment